Pour que demain vienne – Corine Pourtau – éditions Lunatique – 140 p. – 14 €

(actualisé le ) par Brigitte Niquet

C’est toujours avec plaisir que nous découvrons de nouveaux auteurs, surtout quand ils sont aussi talentueux que Corine Pourtau. Ce recueil, curieusement titré « Pour que demain vienne », aurait plutôt dû s’appeler « Dansez, les petites filles », début d’un poème de Victor Hugo mis en exergue et repris par extraits avant chaque nouvelle. Celles-ci ont d’ailleurs pour titres Valse lente, Pas de deux, Pavane, Bacchanale et Séguedille, c’est dire si le thème de la danse est omniprésent, même s’il n’est utilisé que comme métaphore. En fait, il s’agirait plutôt de « danses macabres » car les malheureuses héroïnes de Corine Pourtau se précipitent toutes vers un destin fatal, malgré de remarquables efforts pour y échapper. Elles auraient bien voulu grandir, ces petites filles condamnées à l’anonymat (seule Louna est désignée autrement que par « elle », ce qui n’arrange pas son sort pour autant), elles auraient bien voulu atteindre l’âge adulte, s’épanouir peut-être, mais voilà, la résilience n’est pas donnée à tout le monde et d’ailleurs, elles n’ont même pas le temps d’y songer car, comme le chante Goldman, « d’autres gens en ont décidé autrement ». Portées par le style fluide et élégant de l’auteur, Louna et les autres font trois petits tours, quelques entrechats et puis s’en vont. On a souvent envie de dire : « Déjà ? ».
Évidemment, c’est noir de chez noir. Si vous n’aimez pas ça, abstenez-vous, d’autant que fonctionne à plein « l’effet recueil » : chaque texte est en soi un petit chef-d’œuvre, mais rassemblés, ils peuvent sembler pesants. Quand l’univers d’un auteur est aussi sombre, quand nulle fenêtre ne s’ouvre sans être violemment refermée, il peut arriver que le lecteur « sature ». Mais il y a d’illustres précédents et, heureusement, beaucoup de lecteurs (dont nous faisons partie) « aiment ça » et en redemandent. À quand le prochain opus ?