RESEAU DE LA NOUVELLE et des formes courtes

Résister, n° 98 de la revue Brèves

(actualisé le ) par Nathalie Barrié

La revue Brèves est une revue littéraire trimestrielle éditée par Daniel Delort avec le concours du Centre National du livre, 143 pages, 12 €.

Sous le mot d’ordre Résister et l’égide de Jérome K. Jérome, Katherine Mansfield, Daniel Kerman et Annick Demouzon, le numéro 98 de la revue Brèves conjugue les plumes qui font chanter les voix insolites, non conformes, celles qu’on n’entend pas d’ordinaire. Dans La deuxième vie de Jean‑François, Carole Zalberg explore les coulisses d’une entreprise qui prend l’eau et montre à travers le cas de Jeff, ex-employé modèle, comme il est facile de passer « de l’autre côté » et de perdre tout, sauf sa dignité ; elle explore aussi les profondes racines de la culpabilité, lovées dans une enfance en manque d’attention (Qui vole un œuf). Et tandis que l’écriture féroce de Michel Otz nous livre un conte noir aux ressorts implacables (Les risques du métier), celle de Sylvie Beauget brosse un beau portrait, insolite, de femme expatriée à la dérive, cramponnée à l’idée qu’elle se fait d’elle‑même (Magda, dans L’Histoire). Agnès Thomas, dans Le Paradis, nous surprend avec un drôle de portrait de vieillard, combatif et anti-conformiste, tandis que pour John Baude (Les masques), la vérité d’un être se dilue sous des apparences changeantes. De son côté, Xavier Lapeyroux continue à brouiller les frontières en nous tenant à la limite entre le songe et le réel (Langeland). Dans sa Lettre de Debrecen, Olivier Salaün évoque avec un humour tout en finesse les manifestations d’un lourd passé politique, omniprésent via l’absurdité des menus détails et le tissu d’une micro‑société exsangue, rendue à un vide palpable. La résistance au quotidien : n’est‑ce pas aussi là que se cache, au‑delà du spectaculaire, l’héroïsme ordinaire des anonymes ?