"Elle n’est pas comme nous, il n’est pas comme nous. Pas la même couleur de peau, pas la même religion, pas la même origine... mais aussi pas le même look, pas les mêmes goûts, pas les mêmes manières de parler, de se comporter, de vivre..." Les six nouvelles de ce recueil donnent la parole à ceux qui ne l’ont pas, ou dont la voix est si faible qu’elle ne sait pas se faire entendre.
Il y a Amel et Élie qui se sont rencontrés dans un train sur la ligne Aix-Marseille. Un vrai coup de foudre, malgré leurs différences qui s’enrichissent du contact de l’autre. Elle est musulmane, lui est juif et cela ne leur pose pas de problème. Aux autres si. Un couteau brandi par le frère d’Amel viendra mettre fin à cette si belle idylle.
Arkémi n’est coupable que d’avoir "une couleur de peau différente, un accent bizarre, une histoire qui n’(est) pas celle des garçons de la vallée..." Il vit heureux dans sa famille d’accueil jusqu’à ce que des skins débarquent au village, repèrent le "p’tit Arabe" et décident de "s’le faire". Commence alors la traque, au terme de laquelle le jeune Arménien trouve refuge dans une usine de produits chimiques où des agents de sécurité, aussi éclairés que compatissants, vont écouter son histoire et l’aider à trouver ce travail qui lui permettra de rester en France... Les deux premières nouvelles de ce recueil de six, fruit d’une résidence d’écrivains à Château-Arnoux, donnent le ton. Ces textes excellemment écrits, sans nuance aucune et didactiques en diable, constellés de morceaux de bravoure, semblent propres à faire ouvrir les yeux à ceux de nos ados qui ne regardent pas autour d’eux. On y navigue de situation critique en personnages forts, comme la jeune Juanita, fille d’une "machi" (sorcière) chilienne assassinée par ceux qui déforestent le pays, ce collégien harcelé à la récré et qui se demande "pourquoi moi ?", sans savoir qu’il n’y a pas forcément de réponse, ce journaliste à l’agonie enfermé dans la prison de son corps malade qui se remémore l’attentat de Charlie Hebdo qui l’a privé de son copain Tignous, ou ce jeune résistant à l’âme élevée qui en remontre à sa hiérarchie. Presque tous adolescents, donc proches du lecteur, ils posent les bonnes questions, nous poussent à réfléchir tout en nous secouant le cœur au passage. Des récits militants, sans concessions, qui disent haut et fort "Non !" à l’intolérance. Sous toutes ses formes.
Non à l’intolérance, Collectif dirigé par Murielle Szac, éd. Actes Sud, 96 pages, 8 euros. À partir de 12 ans.