RESEAU DE LA NOUVELLE et des formes courtes

Des nouvelles de la photographie – Jean-Yves Robichon – L’Harmattan (collection Nouvelles nouvelles) 2020

par Brigitte Niquet

C’est sans doute en jouant sur le double, voire triple sens du mot « nouvelles » que Jean-Yves Robichon s’est fait sa place dans la collection de L’Harmattan dédiée à ce genre littéraire. Il ne faut, en effet, pas être trop regardant sur la définition de la nouvelle pour apprécier ce petit livre inclassable, par ailleurs plein de qualités. Il faut surtout être amoureux de la photographie, la vraie (adeptes du smartphone et du selfie à tout va, s’abstenir), celle qui « jaunit, pâlit, s’efface » à l’instar du teint de rose de nos jeunes années.
7 chapitres dans ce recueil, donc, 7 « prises de vue » dont certaines sont de vraies nouvelles, qui racontent une histoire, et d’autres flottent entre plusieurs genres, et même pas de genre du tout. Peu importe. Ce qui compte, c’est le charme incontestable qui émane de ces textes, aptes à susciter beaucoup d’émotion quand par exemple, au soir d’une vie, quelqu’un ouvre une vieille boîte à chaussures et voit la dite vie tout à coup lui sauter à la figure (L’Effacement) – ou quand les nouveaux propriétaires d’une maison très ancienne découvrent au grenier des centaines de photos et se prennent à rêver à ceux qu’ils n’ont pas connus et ne connaîtront jamais, mais dont le bonheur évident dynamise en quelque sorte leur propre couple (Les yeux d’Armande). Parfois même, ce sont les images des parents, voire des grands-parents que l’on retrouve après leur mort et qui vous flanquent une grande claque de nostalgie et de regret (Le jeune homme au costume noir). D’autres fois encore… mais non, inutile de tout dire, le lecteur attentif (et éventuellement photographe averti) sait déjà si ces histoires de clichés jaunis l’indiffèrent ou au contraire s’il va se jeter sur ce livre toute affaire cessante pour en savoir plus et peut-être pouvoir répondre aux questions posées dans le prologue : « Combien de photographies comptent vraiment dans une vie, combien ? Combien nous habitent, nous révoltent, nous bouleversent ? [...] Combien s’immiscent dans nos nuits ? Combien ? »